Mai 2018 : tout à réinventer

Commémorations, célébrations et numéros spéciaux, mai 68 va occuper le terrain jusqu’au tournoi mondial de ballon rond. Mais nous, on ne veut pas vraiment des débats entre témoins et experts : on voudrait surtout que ça recommence, un peu de bordel, du désordre, du chamboulement et des idées. Camille Sauer (qui nous avait déjà parlé de la représentation visuelle du son ici) revient avec un Manifeste détonnant. Elle n’a pas 25 ans et elle marche en tête de cortège !




Mai 2018 prochain, les institutions publiques et privées célèbreront en France l’événement historique de Mai 1968. 50 ans déjà. Pareils à des lingots, les pavés seront lancés de toute part grâce à une communication de masse et aux choix politiques qui légitimeront chaque organisme culturel et ses actes manqués. L’Histoire, de par la méthode qu’elle implique, permet de jouer avec le Passé. Les histoires que les gens racontent la contredisent parfois et nous extirpent de l’illusion d’un passé composé pour nous ramener dans le réel. Elles ont pour fonction d’interférer avec le passé / Le pas assez.

Visiteur, qui que tu sois, il ne s’agit pas tant pour toi d’entrevoir la vérité car chacun porte en lui sa propre vérité mais il s’agit de ne pas t’approprier l’image iconique d’un Event dans sa globalité. Ce poing levé que tu vois accroché au mur avec soin, ce n’est pas le tien.
Ne t’inquiète pas, ton cas social, c’est aussi le mien. Le seuil de la porte de la Culture à peine franchi, tu es déjà mis hors cadre de cette manifestation symbolisée malgré toi puisque tu es absorbé par la ligne de pensée et de lecture d’un autre qui s’affiche sous tes yeux, sans pudeur. La célébration de l’événement est déjà articulée en fonction de la politique de l’organisme qui l’accueille. Quelle place reste-il à ta manifestation? Aucune. Au mieux, tu pourras te détourner de toi-même par le divertissement. Pas de place au jeu pour toi. Ingurgites et tais toi. (ça, ce sont mes mots, pas les tiens). C’est ainsi que Taki 183 a bouleversé ma pensée et ma lecture. L’Histoire n’est utile qu’à partir du moment où l’on en extrait la sienne propre. Pour tout te dire, ma volonté d’entreprendre se voit constamment freinée. C’est une histoire d’amour lambda qui me procure de temps à autre quelques plaisirs furtifs.

Le projet « C’est parti de deux mots : Taki 183 » incarne un engagement réel et spontané de l’artiste. Le 19 mai prochain, des existences vont se manifester sur une plateforme physique véhiculaire que j’aurai crée spécialement pour l’occasion de la Nuit Européenne des Musées: Officier l’officieux dans l’officiel. Pour cela, des artistes se manifesteront au sein d’un lieu particulier. Un endroit iconique le temps d’un moment. Aux passants de devenir passeur. A toi de voir ou de ne pas voir. Il n’est plus question de t’interroger sur tes droits et règles au sein de l’espace public privatisé, mais il est question de ta liberté. Par chance, la plateforme de manifestation peut circuler comme sur des roulettes (parce qu’elle en possède véritablement). Elle n’a donc besoin ni de passe ni de port pour porter sur et en elle l’énergie de la personne qui décide de devenir quelqu’un. Prendre le risque d’en être, seule condition d’existence. Pas de leader dans la manifestation. Simplement des énergies combinées, le temps d’un soir d’abord, puis de moments à-venir afin de permettre à chacun des artistes de faire de l’oeil à la bouche, quitte à s’exposer.

Alors oui, c’est parti de deux mots, Taki 183. Demetrios m’a dit dernièrement que nous n’avons pas besoin de murs pour exister. Nous avons simplement besoin de briser nos propres murs pour exister. Le projet questionne sur ta capacité de résistance et c’est peut-être ce degré de résistance qui nous relie toi et moi à Mai 1968. Mais je crois que c’est avant tout dans le degré de résistance qui nous est propre que nous devons puiser en 2018, comme en tout temps d’ailleurs.


Pour suivre le projet Taki 183, c’est ici !