Tina Modotti et Edward Weston : aujourd’hui, quand on regarde leurs photos à la géométrie parfaite, il est parfois difficile de percevoir quelles ont été leurs audaces artistiques et leurs questionnements esthétiques. Et surtout quelles passions les ont enflammés. C’est cette passion qui transparaît derrière chaque planche de cette édition intégrale de « L’Impertinence d’un Eté », de Ruben Pellejero et Denis Lapière, parue chez Dupuis, dans la collection Aire Libre.
La bande dessinée aimerait-elle Tina Modotti plus que le monde de la photo ne l’a aimée ? Voilà qu’une réédition bienvenue (première parution en deux tomes en 2009 et 2010) met en lumière sa personnalité aux multiples facettes. Précisons qu’en 2011, une autre biographie de Tina Modotti dessinée par Angel de la Calle était sortie chez Vertige Graphic.
Dans L’impertinence d’un été, il est d’ailleurs peut-être moins question du parcours de Tina Modotti que de ses amours tumultueuses avec Edward Weston sur fond de révolution mexicaine, pendant les années 20. C’est peut-être d’ailleurs cela, le vrai sujet de cet album : saisir une sorte de mexicanité, une essence de l’âme mexicaine, entre optimisme révolutionnaire et désillusions noyées dans le pulque.
Avec son dessin d’une souplesse infaillible et son sens de la couleur (l’alternance de jaune lumineux et de bleus mats recréent formidablement les ombres), Pellejero peint une Tina Modotti au charme irrésistible. Car celle dont la photographie n’a été consacrée que de manière posthume (est-ce parce qu’elle était une femme ?) est une héroïne dans tous les sens du terme : par sa vie mouvementée, son engagement politique, sa liberté et bien sûr, par son art.
On suit aussi dans cet album les certitudes et les doutes de différents créateurs : Weston, Diego Rivera, peintre muraliste devenu une gloire nationale et bien sûr, Tina elle-même lorsqu’elle écrit à Edward Weston : vois-tu Ed, je mets bien trop d’art dans ma vie pour mettre de la vie dans mon art.
Une leçon que chaque créateur peut encore méditer.