Paris Photo Book 2019 : l’oeil critique et amoureux

Versión española

Parcours sélectif et critique au prix du Livre Paris Photo & Aperture Foundation lors de l’édition de Paris Photo 2019, par notre chroniqueuse parfaitement objective, Oleñka Carrasco.

A Paris, le mois de novembre s’emplit de rendez-vous variés pour tous les amants de photobooks. L’un des plus importants est le prix que Paris Photo & Aperture Foundation délivrent au Premier Photobook, au Photobook de l’année et au Catalogue de l’année. Voici quatre ans que je ne manque pas ce rendez-vous.

Il est important de se rappeler que les prix décernés par la fondation Aperture sont destinés à des livres qui ont déjà été édités ou publiés par une maison d’édition. C’est vrai que le prix est aussi ouvert aux livres autoédités, mais il est important que l’on puisse assurer l’impression des livres en au moins 100 exemplaires. En partant de là, beaucoup des livres que l’on trouve parmi les finalistes sont déjà bien connus, voire épuisés.

Balade à Paris photo au milieu des livres…

Je commence ma balade au milieu des livres, quelques heures avant que soient annoncés les lauréats dans les différentes catégories, et je me réjouis de trouver parmi les finalistes quelques uns des photobooks qui m’ont plus cette année.

La très belle pièce d’horlogerie de The ( M ) éditions : No more, no less de Thomas Sauvin et Kensuke Koike – cette merveilleuse édition a énormément de mérite de faire partie des nominés, étant d’une subtilité, d’une rigueur et d’une beauté particulières. Le contenu, la démarche des artistes et l’édition elle-même rendent ce livre unique.

No More No Less
©Thomas Sauvin et Kensuke Koike. The (M) éditions

Printed photography in Venezuela

J’avance et je découvre avec surprise un photobook qui me remplit de joie : Printed photography in Venezuela, de Sagrario Berti, réalisé avec une maestria graphique impeccable. Ce livre fait l’inventaire des livres et imprimés illustrés de photographies publiées au Venezuela depuis 1945. Le feuilleter ici, à Paris, s’est transformé en un voyage personnel dans le Venezuela que j’ai connu, où je suis née et où j’ai grandie, et duquel je me suis par la suite exilée. C’est un photobook qui vaut la peine d’être lu sans modération.

Fotografía Impresa en Venezuela. ©Sagrario Berti

 

Fotografía Impresa en Venezuela. ©Sagrario Berti

Hola, mi amol de Karla Hiraldo
Un livre qui questionne…

Je continue mon parcours et m’arrête devant l’un des livres qui m’a généré (et qui a généré dans la rédaction) le plus de questions et de réflexions. Pas tant pour sa forme éditoriale – une édition très classique en A4, imprimée en OffSet – que pour le projet en lui-même et la démarche de l’auteure. Il s’agit de Hola, mi amol de Karla Hiraldo Voleau. En deux mots, la jeune photographe réalise un travail de terrain dans lequel elle revient sur ses origines en République dominicaine, essayant de trouver une réponse, un éventuel contraste à une expression qu’on lui avait répétée depuis qu’elle était petite : “Ne sors jamais avec un Dominicain !” Le livre devient un catalogue, parfois sensuel, parfois érotique, d’une série de rencontres intimes avec des hommes qui travaillent principalement dans le tourisme dans ce pays. Il n’y a pas de mise en scène et beaucoup des images sont des autoportraits de Hiraldo.

Hola, mi amol. ©Karla Hiraldo Voleau

De mes premières impressions, je retiens une sorte de chance de feuilleter, enfin, un livre qui nous montre cette situation depuis la perspective d’une femme photographe. Il faut reconnaître qu’on a vu jusqu’à la satiété ce thème exploité par des photographes masculins qui, dans des infinités de circonstances, nous montrent un catalogue de leurs expériences avec des femmes ; en ce sens, Hiraldo rompt avec un paradigme, en sachant bien que dans cette rupture, sa propre intimité et sa pudeur sont à découvert.

Au fur et à mesure que l’on avance dans le livre, les nus se font plus présents, on découvre des messages que les protagonistes des images échangent avec l’auteure ; on pénètre dans un univers qui, au fond, dérange. C’est alors qu’une seconde réflexion nous interpelle. J’en discute avec ma collègue de rédaction Silvy Crespo : étaient-ils conscients, ces hommes, qu’ils faisaient partie d’un projet de l’auteure ? Venant d’un pays plus riche et puissant, jusqu’où avons-nous de la légitimité pour montrer l’intimité de ces personnes, la rendant ainsi publique ? Peut-être que cette même sensation de soulagement que nous produit le fait qu’une femme photographe ait le courage de nous montrer à ce point son intimité nous rappelle également à quel point cela nous dérange que le corps de centaines de femmes de pays du Tiers monde soient dévoilés par des photographes hommes sans que l’on sache jamais s’il y a eu une forme de consentement.

Je ne suis pas arrivée – nous ne sommes pas arrivées – à une conclusion précise, peut-être qu’à ce niveau-là il faut aller au-delà du livre et discuter avec l’auteure ; j’ai là une tribune ouverte à développer.

Eld Dalia. ©Maja Daniels

Et le coup de coeur est…

J’arrive ensuite à mon livre #CoupdeCoeur du prix First Photobook of the year. Il s’agit du magnifique livre de Maja Daniels, Elf Dalia.

Elf Dalia ©Maja Daniels.

Avec une édition précise et très soignée de Mack Books (136 p.), le livre de Daniels est une invitation à un voyage mystérieux vers un pays presque lointain, où l’on parle une langue presque éteinte : la vallée suédoise d’Alvdalen. Avec une poésie sublime, sans besoin de textes ni de légendes, Daniels génère un dialogue entre ses images de ce lieu et celles des archives de Tenn Lars Parsson. On est ainsi capable de sentir l’atmosphère d’un lieu unique, presque magique, perdu…

 

Dans la catégorie Photobook of the year, ça a été un plaisir de feuilleter l’édition de The Gift de Mari Katayama, publiée par United Vagabonds. Le livre est construit avec une édition très classique ; le plus intéressant est de pouvoir conserver un échantillon du puissant travail de Katayama. Il faudrait préciser que la voir signer ses livres en SAGE relevait quasiment de la performance.

The Gift. ©Mari Katayama

 


Les gagnants des prix 2019

Winner of Photography Catalogue of the Year
Enghelab Street, A Revolution through Books: Iran 1979–1983
Hannah Darabi
Spector Books, Leipzig, Germany ; LE BAL, Paris

Winner of PhotoBook of the Year
Sohrab Hura. The Coast
UGLY DOG (autopublié), New Delhi, Inde

Winner of First PhotoBook ($10,000)
Gao Shan. The Eighth Day
Imageless, Wuxi, Chine

Juror’s Special Mention
Drew Nikonowicz. This World and Others Like It
Fw:Books, Amsterdam ; Yoffy Press, Atlanta

 


Oleñka Carrasco

Écrivaine et photographe, Oleñka Carrasco met son accent au service de Viens Voir une fois par mois, pour la découverte de photobooks, livres d’artistes, livres de photo-texte, mais aussi des éditeurs indépendants. Bref, toutes les tendances de l’objet livre.
Fanatique de la création d’histoires, elle sera notre guide d’exploration dans le monde des livres.

email : hola@olenkacarrasco.com / Internet : olenkacarrasco.com / Instragram : olenkacarrasco

 


Libro de fotos de París 2019: la mirada crítica y apasionada

Reseña selectiva y crítica en el Premio del Libro de la Fundación Paris Photo & Aperture durante la edición Paris Photo 2019, por nuestra columnista Oleñka Carrasco.

En París, el mes de noviembre se llena de citas variadas para todos los amantes de photobooks. Una de la cita más importantes es el premio que Paris Photo & Aperture Foundation otorgan al Primer Photobook, al Photobook del año y al Catálogo del año.

Desde hace unos cuantos años, ésta es una cita a la que no falto.

Es importante recordar que los premios otorgados por la Aperture Foundation, están destinados a libros que ya han sido editados o publicados por un sello editorial, es cierto, el premio también está abierto a los libros autoeditados, pero es importante que se pueda asegurar una impresión de los libros de al menos 100 ejemplares. Partiendo de esta base, muchos de los libros que encontramos entre los finalistas, puede que ya sean conocidos y ya se encuentren incluso agotados.

Comienzo mi paseo entre los libros unas horas antes de que anuncien a los ganadores del premio en las diferentes categorías, y me regocijo al encontrar entre los finalistas, algunos de los photobooks que más me han gustado este año.

La hermosa pieza de relojería de The ( M ) éditions : No more, no less de Thomas Sauvin y Kensuke Koike, esta maravillosa edición tiene todo el mérito del mundo de encontrarse entre los nominados, ya que es de una sutileza, un rigor y una belleza única. El contenido, la demarche de los artistas y la propia edición vuelven a este libro único.

Avanzo y descubro con sorpresa un photobook que me llena de alegría: Printed photography in Venezuela, de Sagrario Berti, realizado con una maestría gráfica impecable. Este libro realiza el inventario de libros e impresos ilustrados con fotografías publicados en Venezuela a partir de 1945 hasta hoy. Hojearlo aquí en París, se transformó en un viaje personal a una Venezuela en la que yo nací, me crié y de la que posteriormente me exilé. Es un photobook que merece la pena tener y hojear hasta el cansancio.

Continúo mi recorrido y me detengo en uno de los libros que me generó (y que generó en la redacción) más preguntas y reflexiones, no tanto por su forma editorial -una edición bastante clásica en A4, tapadura, impresa en OffSet- sino más bien por el proyecto en sí mismo y la demarche de la autora. Se trata de Hola, mi amol de Karla Hiraldo Voleau. En dos palabras, la joven fotógrafa realiza un trabajo de campo en el que vuelve a sus orígenes en República Dominicana, intentado encontrar una respuesta, un posible contraste a un dicho que le habían repetido desde pequeña “¡No salgas jamás con un dominicano!”. El libro se vuelve un catálogo, a veces sensual, a veces erótico, de una serie de encuentros íntimos con hombres que en su mayoría trabajan en el turismo en República Dominicana, no hay puesta en escena, y muchas de las imágenes son autorretratos de la propia Heraldo.

De entre mis primeras impresiones destaca, una suerte de alivio de hojear, al fin, un libro que nos muestre esta situación desde la perspectiva de una mujer fotógrafa. Hay que reconocer que hemos visto hasta el cansancio este tema explotado por fotógrafos hombres que, en infinidad de circunstancias, nos mostraban un catálogo de sus experiencias con mujeres ; en este sentido Heraldo rompe un paradigma incluso entendiendo que en esa ruptura su propia intimidad y pudor están al descubierto.

Según avanzamos en el libro, los desnudos se hacen más presentes, descubrimos mensajes que los protagonistas de las imágenes intercambiaban con la autora, penetramos en un universo que en el fondo molesta. Entonces una segunda reflexión nos interpela, discuto con mi colega de redacción Silvy Crespo, ¿eran conscientes estos hombres de que formaban parte de un proyecto de la autora? ¿Hasta qué punto viniendo de un país rico y poderoso estamos legitimados para mostrar la intimidad de estas personas volviéndola de dominio público? Quizás esa misma sensación de alivio que nos producía el hecho de que una mujer fotógrafa tuviera el coraje de mostrarnos a este punto su intimidad, también nos recuerda a qué punto nos molesta el hecho de que el cuerpo de cientos de mujeres de países del tercer mundo fueran desvelados por fotógrafos hombres sin que supiéramos nunca si algún tipo de consentimiento al desvelar estas imágenes fuera dado.

No llegué, no llegamos a una conclusión precisa, quizás en este punto sea necesario ir más allá del libro y discutir con la autora, he aquí una tribuna abierta a retomar.

Llego entonces a mi libro #CoupdeCoeur del premio First Photobook of the year. Se trata del bellísimo libro de Maja Daniels, Elf Dalia. Precisa y muy cuidada edición de Mack Books de 136 páginas, el libro de Daniels es una invitación a un viaje misterioso a un lugar casi remoto, en el que una lengua casi extinta se habla, el valle sueco de Alvdalen. Con una poesía sublime, sin necesidad de textos, ni leyendas, Daniels genera un diálogo entre sus imágenes de este lugar y las imágenes de archivo de Tenn Lars Parsson. Gracias a las imágenes y el diálogo creado por Daniels somos capaces de sentir la atmósfera de un lugar único, casi mágico, perdido…

En la categoría Photobook of the year ha sido un placer poder hojear la edición de The Gift de Mari Katayama publicada por United Vagabonds. El libro está construido con una edición muy clásica, lo más interesante es poder conservar gracias a sus páginas una muestra del poderoso trabajo de Katayama. Habría que puntualizar que verla firmar sus libros en SAGE era casi una performance.


Los ganadores de los premios de 2019

Winner of Photography Catalogue of the Year
Enghelab Street, A Revolution through Books: Iran 1979–1983
Hannah Darabi
Spector Books, Leipzig, Germany, and LE BAL, Paris

Winner of PhotoBook of the Year
Sohrab Hura. The Coast
UGLY DOG (self-published), New Delhi, India

Winner of First PhotoBook ($10,000 prize)
Gao Shan. The Eighth Day
Imageless, Wuxi, China

Juror’s Special Mention
Drew Nikonowicz. This World and Others Like It
Fw:Books, Amsterdam, and Yoffy Press, Atlanta


Oleñka Carrasco

Escritora y fotógrafa, Oleñka Carrasco pondrá su acento al servicio de Viens Voir una vez al mes para descubrir fotolibros, libros de artistas, libros de foto-texto, así como editores independientes y festivales. Su principal interés: las tendencias del libro como objeto. Fanática de contar historias, ella se volverá nuestra guía de exploración en el descubrimiento del mundo de los libros.

Email : hola@olenkacarrasco.com / Internet : olenkacarrasco.com / Instragram : olenkacarrasco